Trois jours à Berlin (sur le thème de la chute du mur, lire ma chronique ici) m‘avait déjà emballée, j’étais ravie de pouvoir découvrir La route des Balkans, le deuxième roman de Christine de Mazières.

La route des Balkans est un roman polyphonique contant un épisode marquant et récent de l’histoire allemande, les événements qui ont poussé l’Allemagne, soutenue par une majorité d’Allemands, à prendre une décision historique face à la catastrophe humanitaire de l’année 2015 : accueillir dans son pays des centaines de milliers de réfugiés affluant vers le nord de l’Europe à travers la route inhospitalière et accidentée des Balkans.
Au départ il y la découverte macabre du chargement d’un camion frigorifique dans lequel 71 corps de migrants décédés sont découverts, découverte qui forme le noyau central du roman et met peu à peu en relation des personnages venant d’horizons divers mais liés par un rêve unique et commun : rejoindre un pays du Nord de l’Europe !
Trois destins, trois histoires douleureuses : il y a d’abord Asma, qui a fui la Syrie avec sa sœur Lefana et qui monte dans un camion frigorifique pour traverser la Hongrie et rejoindre l‘Autriche. Puis il y a Tamin qui a quitté l‘Afganistan avec 4 autres jeunes garçons perdus en cours de route et qui croise le chemin d’Asma. Et enfin il y a Helga qui habite Munich et qui a fui Königsberg (Prusse orientale) au printemps 1945 à l’arrivée des troupes soviétiques.
Déroutée dans les premières pages du roman par le style un peu froid et distancié de l’auteure franco-allemande, j’ai fini par être gagnée par l’émotion, délicatement distillée entre les lignes…. un peu à l’image de notre relation avec nos amis allemands, qui nous semblent généralement froids et distants au premier abord mais qui, une fois leur carapace ôtée, révèlent des richesses insoupçonnées !
Car quel peuple, quel gouvernement, a fait preuve d’humanité, a ouvert grand ses frontières pendant que d’autres les fermaient, érigeaient murs et barbelés ou en accueillaient au compte-goutte tout en les parquant dans des camps insalubres, qui a décidé de faire face au ras de marée, de prendre les choses en main pour loger des milliers migrants dans l’urgence et dans des conditions décentes… au risque de perdre des électeurs, de voir l‘AFD et petits partis pro-nazis gagner du terrain ?
L’arrivée quotidienne de milliers de migrants en gare de Munich entre fin août et début septembre 2015, sous des salves d’applaudissements allemands, aura marqué les esprits ainsi que la phrase desormais célèbre d‘Angela Merkel, qui restera longtemps gravée dans les mémoires, « Wir schaffen das » (nous y arriverons), entraînant un élan de solidarité dans laquelle l‘Allemagne a mis un point d’honneur à s‘engager !
Car les déplacements de population massifs est un sujet encore fortement ancré dans l’histoire allemande, 13 millions d’Allemands ont également été des réfugiés, il y a près de 80 ans, à la toute fin et au sortir de la Seconde Guerre mondiale … ceux de Prusse Orientale bien sûr mais également ceux des Sudètes, de Silésie, de Poméranie, expulsés ou fuyant l’armée rouge en plein hiver 1945.
« Une tragédie rappelle l’autre »…
Bref, un roman touchant et passionnant que je vous recommande vivement !



